Une de mes amies (qui m’est d’ailleurs très chère), me demandait tout à l’heure au téléphone, comment je faisais pour tomber sur autant d’imbéciles. Je venais de lui parler du livre « le Droit de Cuissage » de M Boureau (cf. post précédent) et de « Sociologie du Dragueur » d’ Alain Soral (qui fera l’objet d’une future publication). Bien sur, mon engagement pour le droit des femmes y est pour beaucoup, je suis plus attentive au discours pro ou anti-féministe et plus généralement sur tout ce qui touche de près ou de loin à la femme.
Mais la volonté complètement assumée de répertorier ce qui va dans notre sens ou ce qui en est très éloigné n’est pas la seule explication. Il suffit d’être un peu curieux. Toute la littérature quel que soit son propos (histoire, sociologie, anthropologie, biologie, lettres etc..) qui date d’avant 1950 comporte des propos misogynes, volontaire ou non, assumés ou pas (ce qui ne veut pas dire qu’il n’en n’existe pas après 1950)
Une de mes dernières découvertes vient du journal intime de Jacques Louis Menetra (1738-1812), compagnon vitrier du XVIIIème siècle à Paris publié chez Albin Michel. J’aime beaucoup les descriptions de la vie ouvrière (d’où mon faible pour Zola) et surtout l’argot populaire et ses expressions fleuries qui sont d’une incroyable imagination. Dès le début je suis surprise par l’omniprésence de la violence (au sein du foyer, chez son patron, avec ses camarades, dans la rue etc...) Vécue comme une évidence, il passe d‘un épisode où son père l‘attache à une chaise à un autre où il rencontre la première fois son patron. Pages 172 et 173 voici ce qu’il raconte:
« Un dimanche allant pour voir Baron dans le faubourg saint Antoine accompagné de mon ami Gombeault nous fumes jusqu'au bois de vincennes. Allant par dedans des broussailles nous trouvâmes un nid humain un jeune homme et une jeune personne en train de bien faire. Il avait eu la prévoyance de planter son épée nue à coté de lui. Je lui dis ces mots Croissez et Multipliez. Comme nous venions par l'effet du hasard (de) l'interrompre dans cette opération humaine il nous envoya par dessus les poiriers. Gombeault à ces sottises se jeta sur son épée et nous le fîmes repentir de son insolence car nous passâmes tous deux sur le corps de la jeune personne à qui nous ne donnâmes pas le temps de s'en remettre et le nigaud qui n'osa nullement approcher. Nous nous moquâmes de lui en remerciant la jeune personne de sa complaisance et quand nous fumes un peu éloigné (nous) lui jetâmes son épée car nous nous tenions sur nos gardes l'un après l'autre »
Jacques Louis Menetra raconte sans le moindre sentiment de culpabilité, sans même le moindre soupçon sur la gravité de son acte, comment lui et son compagnon ont violé une jeune femme pour punir son amant d’une insulte qu’il avait dite...
La violence, je l’ai dit plus haut, est d’une grande banalité à cette époque mais il s’agit surtout de maltraitances, il n’est pas question de crimes ou de vol qui sont sévèrement punis par la loi, comme le viol d‘ailleurs... Encore faut il savoir identifier ce qu’est un viol. A priori on est loin de nos critères actuels. Paradoxalement voler à l’étalage était plus répréhensible que de s’attaquer à une femme légère. Jacques Louis Menetra ne connaîtra jamais la monstruosité de son acte.
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