lundi 30 juin 2008

Une autre exigence du Féminisme (vieux texte que je réedite pour la marche des fiertés)


Comme le rappelle Pierre Bourdieu, la domination masculine est insidieuse, elle passe quasiment inaperçue. Ce n’est plus une théorie ou un concept, c’est un comportement qui s’inscrit dans l’inconscient collectif. Nous l’avons intégré comme structure évidente dans nos rapports hommes-femmes. Une femme sourit toujours quand on l’interpelle dans la rue et un homme boit son verre de tequila cul sec. Nous sommes conditionnés à prendre le rôle d’un dominant ou d’un dominé.


La mise en lumière de cette injustice et le combat mené pour nos droits renversent petit à petit la situation, mais comment lutter efficacement contre un ennemi invisible ? Comment identifier les mauvais comportements ?


L’homophobie consiste, très simplement, à détester les homosexuel(les).

Dans le cas de l’homosexualité masculine, le comportement passif d’un homme est vécu comme un sacrilège. L’idée qu’un homme ose prendre la place traditionnelle de la femme et qu’il se fasse prendre comme elle, répugne. Il perd son statut d’homme, de dominant. Il devient donc une femme, une honte pour les autres hommes qui ne le respectent plus. L’homosexualité dans le milieu carcéral est très représentative de ce système de valeur. Un homme actif reste un homme et conserve sa dignité, l’homme passif est assimilé à une femme, à un soumis, un esclave sexuel à la disponibilité des autres. Ici ce n’est pas vraiment la sodomie qui est remise en cause mais qui fait quoi.

L’homosexualité féminine n’attise pas autant de haine, à première vue. Les lesbiennes restent un phantasmes pour la grande majorité de la population masculine hétérosexuelle. Selon ce phantasme les lesbiennes sont des bombes sexuelles qui s’ennuient à la maison et passent le temps en attendant le retour prodigue de l’homme. Elles en ont le droit si c’est devant une caméra et pour son bon plaisir. Mais si la femme n’est pas disponible sexuellement pour un homme, elle a alors un comportement contre nature. Parce qu’elle a oublié à qui elle devait s’offrir, elle devient l’objet de haine et de répression.

L’homophobie est une manifestation typique inconsciente de la domination masculine. Elle prend sa source dans une vision très péjorative de la femme, ce n’est rien d’autre que de la misogynie camouflée. Chacun doit rester à sa place parce que la place de la femme est détestable pour un homme et qu’elle n‘a pas le droit de se soustraire à son désir. Autoriser le mariage pour les homosexuelles ou le droit d’adopter des enfants remettrait en cause ce schéma séculaire où la femme n’existe que par l’homme, une autre exigence du féminisme.

samedi 28 juin 2008

La Marche des Fiertés




Voici un texte de Jérome ( c'etait le garçon dont la superbe photo prise pendant la marche illustrait parfaitement bien mon article mais qui m'a supplié de la supprimer parce qu'il n'etait pas assez beau dessus, donc désolée pour toi mais tu ne verras pas sa tête) qui m'a gentiment autorisé à le publier sur mon blog (vous pouvez aussi le lire là: http://www.holala.ch/culture/661.html) :


Cela doit bien faire six ou sept années que je ne me suis pas rendu à cette marche... "Marche des fiertés" parce que "gay pride" est un label déposé... Déjà, ça me fait sourire...


Je me souviens la première fois; j'avais 17 ans, plein d'énergie, je portais le t-shirt officiel (et forcément moulant) de la gay pride. Quitte à vous faire sourire, j'avoue tout, je portais aussi une espèce de treillis violet et des baskets orange fluos... J'étais visiblement plus dans l'idée d'un "droit à la différence" qu'à l'indifférence.


Je pense que je devais cette allure au silence, et au secret, que j'avais enfermé des années d'enfance durant, dans ma petite coquille gay. L'homosexualité n'était qu'ailleurs dans mon proche entourage,aussi comment aurai-je pris avec mesure conscience de moi-même, dans un monde où ce que j'étais n'existait pas. L'année précédente, je me souviens; le téléviseur annonce, pour son 13h, la gay pride du lendemain. La télé sature alors en couleur, on y voit des choses informes qui dansent sur des chars, des voix aux manières serpentines qui des graves aux aigus suivent un chemin improbable, et des miliers de gestes lancés avec emphase devant les caméras ébahies. Toujours est-il que je suis à table en famille... Croyez bien qu'à ce moment là, ces images n'arrangent pas mes affaires. Comment pourrais-je leur faire croire que je suis normal quand la seule image qui peut leur parvenir est cette selection de clichés? A cette seconde, je déteste la gay pride faute de pouvoir me dire que les médias chosissent ce qui arrangent leur audimat.


Pourtant un an plus tard, j'y suis. Avec, comme je l'ai dit, la tenue de rigueur... Mais je ne suis pas là pour faire la fête... J'ai enfin cette conscience qui me faisait défaut, je me sens normal et je constate que mes droits ne sont pas respectés... Parce qu'en lecture et en mots je me suis fait mal à fréquenter les explications sur ma pseudo "déviance" et à entendre les quolibets d'excellences: "sale pédé" et "enculé". Alors ce jour là, je suis à la gay pride parce que je veux sentir que je ne suis pas seul et parce que mon âme est devenue celle d'un militant. J'y suis parce que je crois au changement et que je veux donner de l'energie et du temps à la lutte pour la reconnaissance de mon droit à vivre comme n'importe qui d'autre.


Les années ont passé. Mes vêtements on gagné en sobriété. J'ai du faire une ou deux gay pride de plus puis j'ai cessé d'y aller. Sauf quelques groupes profondément investis du sens de cette marche, je n'ai vu qu'une accumulation d'inconsciences festives. J'ai vu cette commémoration devenir une fanfare orchestrée par les intérets commerciaux de telle ou telle enseigne. Je me suis éloigné peu à peu de cet évènement. N'ayant aucune fierté pas plus que de honte à préfèrer les gens de mon sexe au sexe opposé, j'ai aussi trouvé son nom décalé par rapport au sens que je voulais trouver dans cette marche.


Ces quelques dernières années, j'ai regardé du coin de l'oeil comment ce rassemblement comémoratif évoluait... Ben je suis certain que 90% des participants ignorent ce qu'ils commémorent(*voir note en bas d'article pour ceux qui veulent savoir). Je pense aussi qu'au moins la moitié des participants et la quasi majorité des pseudos gay friendly sont surtout content d'aller danser la tete collée dans des enceintes "techtoniques" et/ou de saisir cette journée comme prétexte à leur démesure. Et bien pourtant: aujourd'hui j'y retourne!


J'y retourne parce que j'ai manqué à mon "devoir" ces dernières années, parce que je n'aurai pas du lâcher ceux qui marchent avec conscience, ceux qui militent entre les chars multicolores, ceux qui entre les boîtes à rhytme essaient de passer des messages, ceux qui font que la situation progresse ailleurs dans le monde. J'y vais parce que demain dans cette marche, je ressemblerai un peu à celui que gamin de 16 ans, j'aurai voulu voir à 13h devant le télévioseur. J'y vais en pensant à lui et à ceux d'aujourd'hui qui lui ressemblent.



*Nuit du 27 au 28 juin 1969. A NY, dans un bar homosexuel de Greenwitch (The Stonewall), la police est accueillie à coup de briques. Cet évènement est commémoré depuis à travers le monde à l'occasion d'une gay pride annuelle.


mercredi 25 juin 2008

Les Gouines Rouges

Mouvement radical féministe lesbien, les Gouines Rouges sont fondées en 1971 à l'initiative des lesbiennes du MLF (Monique Wittig, Marie-Jo Bonnet ou Christine Delphy pour ne citer qu'elles). Ces femmes n'avaient à l'origine pas d'autres revendications que d'exister, de vivre leur amour au grand jour, de sortir du silence et de ne plus avoir honte. Elles voulaient s'affranchir en se rendant visible, affirmer leur homosexualité comme choix politique et plus comme une quelconque malédiction.

« Il y a des homosexuelles sur la scène mais il y en a aussi dans la salle. Si nous montons sur scène, c'est parce que nous n'avons plus honte de nous. On nous a enfermées dans le silence, on nous a insultées parce que nous refusons de nous soumettre à la loi des phallocrates et des hétéroflics. Nous sommes fondamentalement subversives. Nous sommes homosexuelles par choix de jouissance. Notre jouissance n'est ni une masturbation à deux, ni un infantilisme psychosexuel, ni une caricature des rapports hommes-femmes. Nous sommes créatures de jouissance en dehors de toute norme. Nous sommes lesbiennes, et nous sommes heureuses de l'être. »
Les Gouines Rouges, in Gulliver n°1, novembre 1972.

Même si le groupe n'a survécu que quelques années, sa présence au sein même du MLF va marquer et transformer la pensée féministe jusqu'ici plutôt tournée vers des reformes (néanmoins nécessaires: contraception, IVG, nouvelle pénalisation du viol, égalité salariale etc..). Les gouines rouges vont lui donner une nouvelle direction, la conduire vers une nouvelle façon de concevoir les femmes, elles vont déconstruire son mythe.

De cette expérience avec les féministes du MLF, ces "nouvelles" homosexuelles, vont acquérir une certitude, l'opposition entre hétérosexualité et homosexualité ne sert à rien, et ne se justifie pas. La limite qui existe entre ces deux façons de vivre devient très floue une fois les conventions sociales dépassées. L'idée que l'identité sexuelle se construit par rapport à une norme (ici l'hétérosexualité) imposée par la domination masculine fait son chemin, c'est la Pensée Straight de Monique Wittig (publié en 1992 et récemment réédité aux éditions Amsterdam).
L'hétérosexualité n'est pas "naturelle" et ne va pas de soi, les différenciations des sexes se sont construites autour de cette norme et pour cette norme. Monique Wittig ira jusqu'à dire que la lesbienne n'est pas une femme et qu'elle n'aime pas une femme parce qu'elle vit au delà de ces principes communément admis, elle échappe au deuxième sexe. La libre disposition de notre corps était une revendication qui a fait l'unanimité chez toutes les femmes révoltées de l'époque mais qui c'est petit à petit perdu vers d'autres considérations (tendre vers la généralisation de la bisexualité ou de l'homosexualité? Revenir vers l'hétérosexualité mais différemment?) tout en maintenant finalement la binarité des sexes.
Aujourd'hui ces femmes nous ont permis de comprendre qu'au delà de l'identité sexuelle ce sont deux genres, féminin et masculin qui se sont construit socialement sur une logique d'opposition de complémentarité et de hiérarchie et qui contribuent à l'inégalité.
Pour reprendre une phrase de Monique Wittig en modifiant le mot lesbienne par individu: "Un individu doit être quelque chose d'autre, ni femme, ni homme, un produit de la société et non un produit de la "nature" parce qu'il n'y a pas de "nature" dans la société"
Le trouble est jeté..

jeudi 5 juin 2008

Défendons le droit des femmes


Après le jugement du tribunal de Lille qui a annulé le 1er avril dernier un mariage au motif que l’épouse avait menti à l’époux sur la « qualité essentielle » qu’est sa virginité, l’association Ni putes ni soumises appelle à manifester samedi 7 juin, à Paris et dans toute la France, « afin de défendre le droit des femmes ».

À Paris, la manifestation aura lieu à partir de la place d'Italie. Plusieurs d’entre nous (de l'association chiennes de garde) s’y joignent en tant que féministes, et vous donnent rendez-vous au coin de l’avenue de Choisy à 14h30, derrière notre banderole LES ÊTRES HUMAINS NE SONT PAS DES MARCHANDISES.



Voir, sur le site Ni putes ni soumises, le texte « Virginité : un verdict qui tombe comme une fatwa »
http://www.niputesnisoumises.com/actualite.php?numactu=191

lundi 2 juin 2008

Témoignage d'un homme violent

La première fois qu'il a cogné une femme - sa compagne du moment, très amoureuse et "jalouse" de lui, assure-t-il -, Serge T., cadre supérieur dans l'industrie, en a tiré plaisir. "Le fait de taper sur elle, ça m'a vachement plu, ça a débloqué des trucs, ça m'a montré, insiste-t-il, que c'est pas dangereux pour moi de taper sur quelqu'un."

Son amie, "toute bleue" de coups, y a aussi trouvé son compte. Parole d'homme. "Avec moi, explique Serge T., elle vit le Prince charmant -moi-, accompagné d'amour impossible (...). L'autre jour, quand on s'est tapé dessus, elle m'a dit : j'en ai marre d'être malheureuse à cause de toi. Je lui ai dit : tu sais à quoi tu joues, c'est pas à cause de moi que tu es malheureuse, tu sais à qui tu as affaire. Et puis, je lui ai dit : de toute façon, tu aimes bien être malheureuse, ça te plaît (...). Elle aime bien ça, être malheureuse. Elle sait comment ça marche." Pour Serge T., le plaisir de cogner est devenu un besoin : "On est accro, quoi..."

Serge T s'est confié à la fin des années 1980 à Daniel Welzer-Lang, l'un des fondateurs du centre d'accueil pour hommes violents de Lyon - premier du genre en France - créé en novembre 1987. Ses confidences figurent en annexe d'un ouvrage du sociologue, Les Hommes violents, réédité en 1996 (Indigo & Côté femmes)

La justice est aveugle

Tout le monde a parlé ou parle encore de l'annulation du mariage prononcée récemment par le tribunal de grande instance de Lille. Le fiancé a utilisé l'article 180 du code civil pour pouvoir "répudier" sa nouvelle épouse qui a menti sur une de ses "qualités essentielles" exigée pour célébrer cette union à savoir sa virginité.

Même si le juge n'a pris en compte que le mensonge pour rendre sa sentence, on ne peut pas passer à coté des motivations religieuses de l'ancien mari et sa vision misogyne de la femme (qui n'est plus considérée comme pure à partir du moment où elle a pu avoir des relations sexuelles avant de connaître son fiancé)


La loi, notre loi en raison de ses imprécisions et de ses procédures trop strictes peut donner raison et défendre des points de vus sexistes. C'est sous son autorité qu' une de nos concitoyennes se retrouve humiliée et rabaissée.

Ce n'est pas la première fois qu'on se retrouve devant une affaire hallucinante où la justice se trouve prise au piège par ses propres lois.

Une femme, Aynour B. est hospitalisée en 2003 après avoir été victimes de violences de la part de son mari. Elle porte plainte et se réfugie avec ses deux enfants auprès de l'association Sedire. Une information judiciaire est ouverte à l'encontre de son mari qui retourne vivre dans son pays natal pour échapper à l'instruction. La plainte est classée sans suite et trois ans après les faits, alors que le divorce est toujours en cours, le mari revient en France et cherche à retrouver sa femme. Il se tourne vers l'association qui a aidé son épouse pour connaître sa nouvelle adresse en invoquant son droit le plus stricte de voir ses enfants et d'exercer sur eux son droit de surveillance. L'association au vu du caractère violent du mari et du danger manifeste qu'encourt son épouse refuse bien évidemment de lui donner.

Il porte plainte contre sa femme et l'association Sedire pour soustraction d'enfant et obtient gain de cause. Même si l'association représentée par son ancienne directrice Mauricette Sauvigon a été relaxée, la cour de justice de Dunkerque a condamnée sa femme à trois mois de prison avec sursis et 800 euros d'amende.


Sans parler de l'immoralité evidente du mari qui n'a pas l'ombre d'un sentiment de culabilité, il ne faut pas oublier son avocate! Déontologiquement une avocate est tenue de défendre n'importe quel accusé mais pas d'accompagner le premier salopard venu dans sa demarche malhonnête de profiter des faiblesses du système.